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Le Troisième plan santé au travail (2016-2020) s’appuie sur l’action des partenaires sociaux et privilégie la prévention primaire

Par Frédéric Laloue, Secrétaire général du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT)

On ne l’a peut-être pas suffisamment souligné jusqu’à présent : le troisième plan santé au travail (2016-2020) est un dispositif doublement original, dans sa procédure d’adoption comme sur le fond.

Le processus de conception du plan a reposé, pour la première fois, sur une initiative partagée, et notons-le, unanime, des partenaires sociaux. La CGT, la CFDT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, le MEDEF, la CPME, l’U2P, l’UNAPL et la FNSEA ont co-construit, dans le cadre du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT), les orientations du plan que les services de l’Etat, appuyés par les réseaux de préventeurs, ont par la suite déclinées en objectifs opérationnels et en actions de terrain.

Or, un tel mode de production, reposant sur l’unanimité des partenaires sociaux, n’a pas débouché sur des demi-mesures. Sur le fond, le plan a clairement privilégié une orientation centrale et transversale : la prévention primaire. En tout point, il s’agissait de privilégier la prévention des risques le plus en amont possible, pour éviter d’avoir à en réparer les conséquences.

Les partenaires sociaux ont également intégré, par exemple, la nécessité de décloisonner les approches de santé publique et de santé au travail. Ils ont en outre ajouté à leur analyse des risques provoqués par le travail une conception positive de ce dernier : lorsqu’il est de qualité, le travail est une ressource en termes de santé publique. Ainsi la santé des demandeurs d’emploi est-elle en moyenne bien moins bonne que celle des travailleurs.

La rédaction du « PST3 » a donc représenté une étape décisive dans la politique de santé au travail en France sur le plan conceptuel.

Ce texte est aujourd’hui à l’origine d’actions concrètes, destinées à transformer effectivement les conditions de travail : mise en place de cellules pour prévenir la désinsertion professionnelle, actions pour promouvoir le dialogue social dans l’entreprise sur la qualité de vie au travail, création d’un site Internet destiné à regrouper toute l’information disponible sur les addictions dans le cadre du travail, etc.

Cette politique dispose de relais institutionnels puissants : les services de l’Etat, en premier lieu, les organismes de prévention (Sécurité sociale, INRS, ANACT-ARACT, OPPBTP, etc.) et les services de santé au travail maillent le territoire et sont à même de toucher les plus petites entreprises et leurs salariés.

Un autre de ces relais est souvent peu évoqué, alors qu’il est aux sources mêmes de la conception du « PST3 » et qu’il possède un effet de levier considérable : les partenaires sociaux.

Qui en effet est plus à même de porter auprès des employeurs et des salariés les messages de prévention que les employeurs et les salariés eux-mêmes, et leurs représentants démocratiquement désignés ? L’amélioration effective des conditions de travail passe par l’appropriation de ces enjeux dans chaque entreprise.

Les partenaires sociaux sont des rouages essentiels dans la « gouvernance » de l’ensemble des institutions spécialisées dans des conditions de travail (organismes de prévention, services de santé au travail, protection sociale, complémentaires, etc.). Mais ils sont aussi les représentants légitimes du monde du travail. Ils peuvent ainsi constituer les relais des messages de prévention au sein des branches professionnelles, des comités régionaux d’orientation des conditions de travail, des chambres consulaires, des CHSCT (et demain des CSE).

Ils peuvent y porter de manière très concrète des actions de maîtrise des risques professionnels, de maintien en emploi des salariés malades ou vieillissant, ou encore de promotion de la qualité de vie au travail.

Il s’agit d’ajouter à l’indispensable technicité des politiques de santé au travail l’idée selon laquelle ces politiques sont l’affaire de tous : chaque salarié, chaque employeur peut agir à son niveau.

C’est le pari du « PST3 ». Il est intéressant de noter que la stratégie nationale de santé adoptée le 29 décembre dernier est en totale cohérence avec ces orientations. Sans se confondre, la santé au travail et la santé publique partagent méthodes et objectifs, à commencer par la priorité donnée à la diffusion et au partage d’une culture de la prévention. 

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