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“Le débit de boissons qui s'est renouvelé se porte très bien”

Entretien avec Jacques Chomentowski, Président de la Section des débitants de boissons à l’UMIH Strasbourg

Quel regard portez-vous sur l’enquête du CREDOC ?

Nous avons une législation historiquement très dure sur les débits de boissons avec une volonté certaine de les faire disparaître en France pour des raisons de santé publique notamment. Après être arrivé à un point critique de 200 000 débits de boissons en France dans les années 60, on a continué sur cette voie. Comment s’étonner ensuite que ces établissements disparaissent. Cette disparition programmée est donc le résultat d’une législation historiquement dure mais pas seulement. Il existe aussi et c’est indéniable, un problème de non adaptation au marché. Les habitudes des Français changent et se rapprochent de celles des Anglo-Saxons. Si en France on mange et on boit plus à la maison qu’en Allemagne, en Angleterre ou aux Etats-Unis, aujourd’hui la tendance s’inverse, on sort plus qu’auparavant. Il faut alors s’adapter à cette tendance au niveau des prix et des produits. Le débit de boissons que l’on a connu, le café, n’a plus de raison d’être sans nourriture (sauf pour les bars de nuit). Aujourd’hui parler d’un café ouvert le jour, c’est parler d’un café-brasserie. Avec une tendance à la restauration rapide avec des produits sains où l’on peut manger en 40 minutes à la sortie du bureau par exemple. Ces établissements avec alcool qui se sont renouvelés tournent et les autres meurent. Le débit qui ne fait que du liquide connaît de vraies difficultés. Sans oublier le monde rural, où l’existence même de ces cafés est menacée.

Que faire ?

Je le répète, il faut une adaptation. Economiquement, le café seul n’y arrive plus. Faut-il le remplacer par du multiservices ? A mon sens, oui. Le café pour survivre doit trouver d’autres débouchés : dépôt de pains, relais colis – les commerces traditionnels expliquent qu’ils sont en train de mourir à cause d’Amazon, en même temps, Amazon doit bien livrer ses colis -, annexe de la Poste, salle de concert…. Il y a sans doute beaucoup de choses à imaginer.

N’y a-t-il pas aussi un problème de licence ?

L’UMIH a oeuvré pour que la licence de village soit transférable. Auparavant, cette licence IV n’était pas transférable (La licence IV autorise la vente de toutes les catégories d’alcools). Cela avait pour objectif de maintenir une licence dans le village mais cela avait aussi pour effet pervers de la faire disparaître au bout de trois ans si elle n’était pas exploitée. Le fait qu’elle soit transférable lui permet d’être sauvée (On ne délivre plus en France de licence IV. Il faut soit en racheter une sur le marché, soit se la voir rétrocéder par une municipalité qui l’avait conservée). Sauf qu’elle a de forte chance d’être transférée dans un centre-ville. Il faut ajouter à cela un autre effet pervers qui concerne les régions. La licence du village peut aujourd’hui se retrouver à l’autre bout de la nouvelle grande région. Une licence exploitée au fin fond des Ardennes peut « réapparaître » au coeur historique de Strasbourg ! Peut-être faudrait-il aussi en 2017 réfléchir à une différenciation dans les licences entre un débit de boissons simple et/ou de nuit sans restauration et des restaurants qui servent aussi de l’alcool. Il y a des choses à faire mais les mauvaises habitudes ont la vie dure. 

 

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