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Penser le rail sur le long terme

Par Fabienne Keller, Sénatrice (LR, Bas-Rhin), Secrétaire nationale LR en charge des Transports et de l’Énergie

Tout commence par un recul. Les bonnets rouges sont dans la rue. Les autoroutes sont bloquées. Les portiques brûlés. Dès l’automne 2014, Ségolène Royal prend finalement la décision de renoncer à l’écotaxe. C’est une catastrophe pour le rail français qui doit renoncer à la bagatelle de 360 millions d’euros par an.

Cela se poursuit par un renoncement. A l’horizon 2018, l’immense majorité des lignes de trains de nuit seront abandonnés faute de passagers. Et pour cause : cela fait plus de 20 ans que ces trains sont laissés à l’abandon et ne bénéficient d’aucun investissement. En somme, on a laissé la situation se dégrader pour mieux en justifier la suppression dans l’opinion.

La crise médiatique : seul moteur de l’action

Oui, il manque un État stratège pour le secteur ferroviaire. Un État qui s’évertue à élaborer un projet cohérent sur le long terme. Un État qui ne se focalise pas seulement sur les crises médiatiques et les échéances à court terme.

L’exemple d’Alstom est à ce titre éclairant. Cela faisait plusieurs mois qu’avec des collègues sénateurs nous entendions des remontées alarmantes du terrain pour Alstom et le projet de fermeture de sites. Nous avons écrit au ministre des Transports, au ministre de l’Economie, au Premier ministre, au Président de la République. Nous avons été même reçus sous les ors du palais de l’Élysée par le directeur adjoint de Cabinet du Président. Tous nous ont répondu poliment. Tous ont été « à l’écoute ». Puis…tous ont vaqué à leur événement médiatique du moment.

Et puis, soudain, l’événement médiatique, ce fut justement Alstom. Sur le fond, rien de bien nouveau, mais sur la forme, c’est la « Une » de tous les journaux, c’est le traitement en continu de l’information, c’est l’idée même d’un gouvernement incapable de maintenir ses fleurons industriels sur le sol français. Alors il fallait agir. Pas le temps d’être stratège, il fallait annoncer des commandes, de la main d’œuvre et du travail. Il fallait donner le sentiment que le Gouvernement était au travail.

Finalement, on mettra, contre toute logique, des TGV sur des lignes intercités. Belfort est « sauvé » et médiatiquement on passe à un autre sujet. Mais à quel prix ? Aucun des problèmes de fond n’a réellement été réglé.

La France, un laboratoire des déplacements vertueux pour le Monde

Pourtant, la France a tous les atouts pour réussir. Au moment où le monde entier s’est engagé lors de la COP21 à se tourner vers la réduction des gaz à effet de serre, l’expertise de la France dans le rail avec Alstom, la SNCF, Thales, EGIS, Gare et Connexions, l’AREP ou encore la RATP est absolument déterminante. Les contrats remportés aux Etats-Unis, en Inde, au Sénégal ou en Algérie sont, à ce titre, de formidables réussites.

Oui, la France peut être un laboratoire des déplacements vertueux pour le monde entier. Si nous nous dotions d’un État stratège, si nous envisagions le rail avec une stratégie de long terme, ce secteur pourrait être pour notre pays un formidable levier de croissance et un véritable vivier de nouveaux emplois pour ces 20 prochaines années. 

 

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