Le président Trump s’est engagé à maintenir les Etats-Unis au premier rang mondial. Xi Jinping affirme la même ambition pour la Chine. Quelles sont les chances de la Chine d’y parvenir ? Quelles seraient les conséquences pour les démocraties si elle y parvenait ? Il convient dès maintenant de concevoir des ripostes.

Le Président Trump a promis à ses concitoyens de maintenir les Etats-Unis au rang de première puissance mondiale. Dès 2012 Xi Jinping avait renouvelé l’ambition de la Chine de supplanter les Etats-Unis à cette première place. Espérons que la compétition restera pacifique. Quelles sont les chances de la Chine de réaliser son ambition ? Un simple calcul montre que c’est techniquement possible. Mais cette simulation théorique ne répond pas vraiment à la question. Elle exclut les aléas qui surviendront.

Le PIB des Etats-Unis 2015 était de 17.968 Mds $. Une croissance de 2,2 % l’a porté à 18363 Mds $ en 2016.

Le PIB de la Chine en 2015 était de 11.385 Mds $. Une croissance de 6,6 % l’a porté à 12136 Mds $ en 2016.

Le taux de croissance chinois fut triple de celui des Etats-Unis en 2016. Les chances de la Chine de dépasser les Etats-Unis dépendent de l’écart de croissance qu’elle maintiendra avec les Etats-Unis. Par prudence réduisons cet écart. Retenons pour les Etats-Unis un taux de 2,5 % pour les années suivantes, supérieur à celui de 2016 et pour la Chine un taux de 6,2 % inférieur à celui de 2016 et à celui de 6,5 % retenu par le 13ème Plan. Les statistiques établies sur ces bases et à taux de change constant dollar/yuan, conduisent la Chine à dépasser les Etats-Unis en 2028. La Chine a l’ambition d’y parvenir en 2025.

Que la première puissance économique mondiale puisse être dans une dizaine d’année un pays communiste de parti unique voulant diffuser son modèle devrait inciter dès maintenant les démocraties à organiser leur riposte pour préserver leur avenir. C’est le premier enjeu. Il est géopolitique.

On mesure déjà ce que la puissance de la Chine lui permet d’imposer à ses voisins et à l’économie mondiale alors que son économie est encore inférieure du tiers à celle des Etats-Unis. Qu’en sera-t-il si son économie devient la première et comment se prémunir contre ce qu’elle serait en mesure d’imposer ? Il faut dès maintenant imaginer ces ripostes. L’enjeu est d’importance.

Mais cet accès au premier rang, techniquement possible, pourrait se trouver entravé dans les décennies à venir. Par quels événements en Chine et dans le monde ? C’est un enjeu qui commande les deux premiers.

L’Occident s’est régulièrement trompé sur la Chine sous-estimant ses performances, le laissant ensuite désemparé faute de les avoir prévues.

Les Etats-Unis ont une grande capacité d’innovation soutenue par leur puissance acquise leur permettant de conserver une croissance honorable pour une économie mature. Mais une économie mature ne peut guère espérer une croissance supérieure à 3 % sur la longue durée. Une financiarisation excessive, la prévalence du court terme, l’influence du système financier sur les institutions politiques, dénoncées par les Américains eux-mêmes, réduisent l’efficience des facteurs de croissance.

La Chine dont la population est quatre fois celle des Etats-Unis alors que son PIB n’est que les 2/3 de celui des Etats-Unis a un potentiel de croissance considérable qui attire les firmes multinationales voulant tirer profit de ce potentiel. Le vieillissement de la population après 2020 pèsera sur la croissance. 300 millions de ruraux seront alors partis travailler en ville épuisant les réserves de main d’œuvre disponible. Des erreurs de politique économique pourraient entamer la croissance et une crise politique au sommet l’annihiler. Une telle crise entraînerait la chute de l’économie tant l’économie dépend du pouvoir politique en Chine.

Une guerre commerciale entre les deux pays affecterait leurs économies dans des proportions difficiles à mesurer.

Si la croissance chinoise demeure supérieure à celle des Etats-Unis elle favorisera une appréciation du yuan face au dollar. Le PIB chinois évalué en US$ augmenterait d’autant, accélérant la croissance de l’économie chinoise. S’il faut oser un pronostic : la Chine parviendra à dépasser l’économie américaine mais le délai fixé par la Chine à 2025 est peut-être un peu court. ■

* Auteur de La Chine depuis le congrès de 2012. Ambitions et résistances. L’Harmattan, Oct 2016