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Préparer l'avenir de la Nouvelle-Calédonie

Par Philippe Gomes, Député de la Nouvelle-Calédonie

Fin avril le Premier Ministre a effectué un déplacement de plusieurs jours en Nouvelle-Calédonie. Reportée en raison du contexte tendu en métropole, cette visite était très attendue, tant par les élus que par le peuple calédonien.

A l’instar de la métropole, nous subissons une crise économique sans précédent qui frappe ici notre industrie du nickel, véritable poumon financier et social du pays.

La situation politique est elle aussi sous tension : en vertu de l’accord de Nouméa de 1998, la Nouvelle-Calédonie doit achever son processus de décolonisation négocié en organisant, d’ici 2018, un référendum d’autodétermination. Les Calédoniens devront faire un choix crucial pour leur avenir : décider de l’indépendance - ou non - de leur pays.

Le Premier ministre s’est donc surtout exprimé sur ces deux sujets majeurs.

Le nickel d’abord. C’était une étape clé du déplacement du Premier Ministre.

La chute des cours du nickel de ces derniers mois a plongé notre industrie minière dans de graves difficultés. Début avril, j’avais interpellé Manuel Valls à l’Assemblée nationale sur ce sujet, lui demandant un engagement fort de l’Etat. Mes demandes ont été entendues.

Admettant que « oui, la situation est grave, oui, le secteur du nickel est plus que jamais fragile », il a annoncé un prêt de l’Etat d’un montant maximum de 24 milliards CFP (200 millions d’€) pour sauvegarder la Société Le Nickel (SLN), principale productrice de nickel en Calédonie et plus ancienne usine du Pacifique sud. Les modalités du soutien financier de l’Etat à la SLN, via la Société Territoriale Calédonienne de Participation Industrielle (STCPI) qui associe les provinces calédoniennes à hauteur de 34 % au capital de la SLN , sont en cours de discussion. En tant qu’administrateur d’Eramet, maison-mère de la SLN, et Président délégué de la STCPI, ma responsabilité est de veiller au respect de l’équité entre les actionnaires, tant dans le montant de leurs contributions respectives que dans les conditions de remboursement de cet emprunt.On ne peut demander aux actionnaires d’être égaux en devoirs s’ils ne le sont pas en droits….

Autre annonce majeure sur le nickel : la SLN aura bien sa nouvelle centrale électrique attendue de longue date et indispensable à la compétitivité à long terme de l’outil industriel.Le Premier Ministre a confirmé que « le Gouvernement soutiendra les démarches qui permettront de concrétiser ce projet » et " apportera sa garantie au financement bancaire du projet ".C’est là une étape décisive qui va permettre de remplacer la centrale de Doniambo, à Nouméa, aujourd’hui obsolète et coûteuse.

C’est un pas important que le Gouvernement fait vers les Calédoniens, une main tendue qui donne corps à de nombreux espoirs.

L’avenir politique et institutionnel de la Calédonie ensuite.

Manuel Valls a rappelé que « le temps est compté, novembre 2018 c’est déjà demain ». S’il a assuré que « l’Etat assumera pleinement son rôle » dans la perspective du référendum, il a surtout demandé à tous les protagonistes calédoniens de préparer déjà « l’après », pointant ainsi du doigt la vraie difficulté à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontée.En effet, quel que soit le résultat du référendum, aucune ligne de ce jour d’après la consultation n’est écrite : ni celle d’un État souverain, ni celle d’une Nouvelle-Calédonie émancipée au sein de la République. J’ajouterai même, qu’en l’état actuel des choses, ce référendum serait un saut vers un "néant institutionnel".

Se prévalant de « la fameuse méthode Rocard » qui, en dehors d’avoir été son mentor politique, fut le père fondateur des Accords de Matignon de 1988, le Premier Ministre a insisté sur une méthode basée sur l’« exigence de vérité (…) la confiance et le dialogue ». Comment ne pas souscrire, dès lors que les convictions de chacun sont respectées , à cette volonté de rechercher le compromis et le consensus entre indépendantistes et non indépendantistes ?

Les principales formations politiques calédoniennes se sont engagées en ce sens, lors du Comité des signataires de février dernier, pour définir la somme de leurs « convergences » et identifier leurs « divergences » sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.

Dans cette perspective je souhaite ardemment que le Comité des signataires d’octobre prochain constitue une nouvelle étape constructive du défi que nous devons relever pour offrir un nouvel horizon au peuple calédonien. 

 

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