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Une proposition de loi pour financer les industries de défense françaises

Portée par le sénateur Pascal Allizard (LR) la proposition de loi vise à assurer des moyens de financement supplémentaires pour l’industrie de la défense française, notamment en fléchant l’épargne déposée sur les Livrets A des Français.

Avec l’Ukraine, la guerre est à nos portes et les pays européens se laissent gagner par l’inquiétude. Sommes-nous prêts à nous défendre et à défendre l’Ukraine ? Nos industries de défense sont-elles prêtes à fournir les armements nécessaires ? Pas certain, doute le sénateur Pascal Allizard, auteur de la proposition de loi. Il juge les entreprises françaises de défense « fragilisées », en particulier les petites et moyennes entreprises. Et le sénateur de lister les écueils rencontrés : intérêt de la part d’investisseurs étrangers, « qui veulent en prendre le contrôle », difficultés de financement : « soutien public limité, accès parfois restreint aux financements bancaires et manque de fonds d’investissement consacrés à la base industrielle et technologique de défense ». « Les mésaventures d’entreprises comme Latécoère, Photonis, Aubert & Duval, Exxelia, Segault, Atos (...) illustrent les fragilités françaises en matière de financement et de protection des entreprises » a tenu à rappeler le sénateur.

Fort de ce constat et afin de soutenir le financement des entreprises de défense française, la proposition de loi prévoit d’affecter une partie des 226 milliards d’euros de ressources collectées au titre du livret A et du livret de développement durable et solidaire (LDDS) et gérés par les banques vers les entreprises de l’industrie de défense française, notamment petites et moyennes. Il y a plusieurs mois de cela, le Sénat avait présenté un tel dispositif visant à assurer des moyens de financement supplémentaires pour l’industrie de défense française. Adopté au Parlement, le dispositif avait été retoqué par le Conseil constitutionnel qui l’avait censuré à deux reprises au motif qu’il était sans rapport avec les textes avec lequel il était présenté. D’où ce passage par une proposition de loi ciblée sur le sujet. Le texte du sénateur permet donc de préciser le dispositif « pour que le nouveau fléchage vers les entreprises de la défense ne conduise pas à diminuer les parts des ressources collectées au titre du livret A et du LDDS aujourd’hui affectées au financement de la transition énergétique et de l’économie sociale et solidaire ». Il permet ensuite d’ajouter le soutien à la base industrielle et technologique de défense (BITD) à la liste des missions de Bpifrance ; et enfin de compléter la demande de rapport d’évaluation pour disposer au plus vite des outils les plus appropriés pour répondre au besoin de financement des entreprises de la BITD.

Le texte a été adopté en première lecture par 244 voix et 34 contre. La mesure doit permettre d’aider à financer les 4 000 entreprises du secteur et leurs 200 000 emplois.

Du côté du gouvernement, on s’est montré réservé. Au banc des ministres, Olivia Grégoire, la ministre déléguée chargée des entreprises estimant que « les banques suivent majoritairement les PME qui ont des projets », a fini par juger que « l’instrument », la voie législative, « [n’était] pas le plus approprié ». « Il apparaît très clairement qu’il y a des difficultés bien plus importantes pour les PME de la BITD quand il s’agit d’accorder des financements en fonds propres ». « Le capital-investissement français est bien trop peu présent. Le coeur du problème semble être plutôt là » a expliqué la ministre. Olivia Grégoire s’est toutefois voulue rassurante, en indiquant qu’en lien avec le ministre des Armées Sébastien Lecornu, Bercy réunirait « à l’été » les acteurs financiers, investisseurs et industriels de la défense pour un « événement majeur » sur le financement du secteur, « pour lever les préventions des investisseurs ».

Au Sénat toujours, les socialistes, par la voix du sénateur Rachid Temal, défendaient pour leur part la création d’un livret dédié - le « Livret d’épargne défense souveraineté » qui aurait, selon lui, le mérite de « clarté et transparence ». La proposition a été rejetée par le Sénat.

Aujourd’hui, près de 60 % des fonds du Livret A et du LDSS sont dédiés au logement social, quant au reste de l’épargne, celle dans le collimateur des sénateurs, elle est fléchée à destination des PME, de la transition énergétique et de l’économie sociale et solidaire. 

Des entreprises françaises vont “créer des partenariats” pour produire des armes “sur le sol ukrainien”
« Huit propositions ont fait l’objet d’un consensus (lors de la réunion de soutien à l’Ukraine le 26 février à Paris) », a expliqué au micro de RMC le 8 mars dernier, le ministre des armées Sébastien Lecornu. « Certaines relèvent du civil, d’autres du militaire : nous voulons produire des armes sur le sol ukrainien et les entretenir, ces armes. Nous avons proposé de construire des usines françaises ou européennes sur le sol ukrainien, pour se rapprocher de la ligne de front et cela a fait l’objet d’un consensus européen » notamment avec les Allemands, « qui ont un ensemble industriel important ». Le ministre a alors indiqué que des entreprises françaises allaient créer « des partenariats ». Trois d’entre elles livreront « des drones, du matériel terrestre », « en lien avec des entreprises ukrainiennes ». « On va créer des pièces détachées, peut-être même des munitions » mais « ça prendra plus de temps » a ajouté le ministre.

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