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La pêche (pas encore) durable

En France hexagonale 56 % des volumes de poissons débarqués en 2022 proviennent de populations exploitées durablement. Un bilan en très légère progression par rapport à l’an dernier mais loin des objectifs européens.

Le bilan 2023 montre que 56 % des volumes de poissons débarqués dans l’hexagone en 2022 proviennent de populations exploitées durablement, contre 54 % en 2021. Cela dit, « la surpêche touche quant à elle 20 % des volumes des débarquements, et 2 % proviennent de populations considérées comme « effondrées » » a déploré l’Ifremer dans sa conférence de rentrée. Une progression donc peu marquée avec des chiffres qui sont encore loin de l’objectif de 100 % des populations pêchées au niveau du rendement maximum durable (RMD) fixé par la Politique commune de la pêche.

Les débarquements de poissons en France hexagonale en 2022 totalisent 347 000 tonnes. « Ils sont en augmentation suite aux débarquements plus faibles de la période 2019-2021 (325 000 tonnes par an environ) sans pour autant atteindre les 400 000 tonnes débarquées annuellement entre 2010 et 2018 » note l’Ifremer. Pour autant, malgré ces variations des volumes de poissons débarqués, l’évaluation 2023 de l’état des populations révèle une répartition stable par rapport à 2022.

Selon la façade maritime et la variété de poisson, la situation peut être contrastée. Ainsi en mer du Nord et à l’est de la Manche la situation est « plus positive » que pour les autres façades maritimes : plus de 63 % des volumes de poissons débarqués en 2022 proviennent de populations en bon état (contre 65 % en 2021 et 21 % en 2010). Ces résultats s’expliquent notamment par le bon état des populations de hareng et de coquille Saint-Jacques, qui représentent à elles deux plus de la moitié des débarquements. Dans l’ouest de la Manche et en mer Celtique, la part des volumes de poissons débarqués issus de populations en bon état augmente lentement depuis 2010, pour atteindre 50 % en 2022 (contre 45 % en 2021 et 33 % en 2010) avec en tête : la coquille Saint-Jacques, la baudroie et le merlu européen. Le volume total des débarquements fluctue depuis quelques années, totalisant 133 000 tonnes en 2022 contre 140 000 tonnes en 2021. Dans le golfe de Gascogne, sur les 77 000 tonnes de poissons débarqués, la part du volume de poissons issus de populations en bon état est globalement en baisse depuis plus de dix ans. Est obligé de noter l’Ifremer, elle est passée de 44 % en 2010 à moins de 37 % en 2022 (36 % en 2021).

Mais c’est en Méditerranée que la situation est la plus préoccupante où seuls 36,5 % des 18 000 tonnes de poissons débarqués sont pêchés durablement et seuls 2,5 % des volumes de poissons débarqués sont issus de populations en bon état.

Si dans l’hexagone, la part des volumes de poissons issus de populations exploitées durablement est passé de 18 % en 2000 à plus de 50 % depuis 2017 (56 % en 2022), « la situation reste encore loin des objectifs fixés par la Politique commune de la pêche (100 % de populations pêchées au niveau du RMD) et par la Directive cadre stratégue pour le milieu marin (tous les stocks en bon état) » reconnaît l’Ifremer. « Le renouvellement des populations de poissons reste fragile. Pour que la pêche soit durable, il faudrait non seulement atteindre l’objectif de 100 % des populations de poissons en bon état mais aussi s’y maintenir sur le long terme » insiste Clara Ulrich, coordinatrice des expertises halieutiques à l’Ifremer. « L’un des facteurs essentiels de la durabilité repose sur la capacité des populations de poissons à se renouveler. Pour cela, il faut non seulement que les adultes participent à la reproduction en proportion suffisante, mais aussi que les jeunes survivent jusqu’à un âge où ils pourront eux-mêmes se reproduire. Or dans le milieu naturel, on estime qu’environ seul un œuf sur 100 000 survivra jusqu’à devenir un poisson adulte » souligne-t-elle. De très nombreux facteurs peuvent en effet impacter le taux de survie des œufs et larves de poissons, qu’ils soient naturels comme la prédation ou liés aux activités humaines (destruction des habitats côtiers, pollutions...). Le changement climatique impacte également de plus en plus d’espèces et peut engendrer des conditions environnementales défavorables à la survie des larves de poissons alerte l’Ifremer. 

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